EXTRACTION DE SABLE COQUILLIER
EN BAIE DE LANNION.
A l’occasion
de la visite du Président de la République en Bretagne, la Presse s’est faite
l’écho de ses déclarations au sujet de l’extraction de sable coquillier en Baie
de Lannion.
Si certains se sont immédiatement réjouis et ont crié victoire,
d’autres comme Pleumeur Bodou Nature ont analysé les propos du Président de la
République.
Dans Ouest-France on a pu lire : « Les conditions ne sont
aujourd’hui pas satisfaisantes. Nous avons demandé au groupe Roullier de faire
des propositions pour qu’on puisse combiner les intérêts légitimes du groupe et
les préoccupations des associations. Il faut que les gens sachent se parler.
Des négociations vont être ouvertes. ».
PLEUMEUR BODOU NATURE REPOND.
« Les conditions ne sont aujourd’hui
pas satisfaisantes... ».
Cela peut
également vouloir dire que « Les conditions » (d’exploitation)
pourraient devenir satisfaisantes! Et pour qui et comment? Tout simplement
pour la C.A.N., qui est une filiale du groupe Roullier, en modifiant pour la
énième fois ces conditions (volume par exemple). Une fois de plus on ne parle
que des conditions et non des conséquences.
« … Nous avons demandé au groupe
Roullier ... ».
C’est la
première fois qu’officiellement un élu de la République nomme ce groupe. Jusqu’ici
c’était la CAN (Compagnie Armoricaine de Navigation) qui était nommée ;
d’ailleurs c’est cette filiale du groupe Roullier qui a déposé le dossier
d’exploitation et qui a obtenu à la fois un décret ministériel approuvé en
Conseil d’Etat et les autorisations préfectorales d’extraction. Donc on peut aujourd’hui
affirmer que depuis le début de cette histoire c’est le groupe Roullier qui
est aux commandes ; mais ce n’est pas vraiment un scoop.
« ... de faire des propositions pour
qu’on puisse combiner les intérêts légitimes du groupe et les préoccupations
des associations… ».
Combiner les
intérêts légitimes du groupe Roullier et les préoccupations d’associations ?
Voici créée une bien grande marche avec, en haut, des « intérêts légitimes »
et en bas des « préoccupations d’associations ». Aspirer du sable coquillier au détriment de la vie sous-marine serait donc
légitime ! Messieurs du groupe Roullier, sachez que les « préoccupations »
ne sont pas seulement celles des associations mais celles des Trégorroises et
Trégorrois et même de tous les Français. Les associations ne font que fédérer
l’énergie de la colère ! Quel manque de respect pour nous.
Le groupe
Roullier aurait donc des intérêts à agir. Mais alors, pourquoi le groupe
Roullier n’a-t-il pas déposé lui-même le dossier de demande d’extraction et
obtenu le décret (et donc le titre minier) valable jusque 2030? Pourquoi ce
groupe mondial a-t-il laissé faire sa filiale ? Aujourd’hui, dans
l’impasse, ce sont les « têtes » qui reprennent la main ;
curieuse méthode.
« … Il faut que les gens sachent se
parler… ».
Mais nous
savons nous parler ! Simplement, personne dans le groupe Roullier ne
veut entendre la réaction populaire ! Nous avons démontré plusieurs fois
et officiellement que l’étude du document initial de la C.A.N. ne tient pas la
route. Nous avons prouvé que les besoins en sable coquillier sont largement
couverts par les extractions aux Duhons, à La Cormorandière et à La Horaine.
Nous avons prouvé qu’un désastre écologique aurait lieu dans la zone des 7 Iles
et au-delà.
« Que
les gens sachent se parler » veut peut être dire que nous devons écouter
et approuver béatement les arguments du groupe Roullier qui légalement a un
intérêt (financier)à aspirer à bas coût le sable coquillier sans tenir
compte du rôle vital de cette dune située à 4km du bord de mer.
« ... Des négociations vont être
ouvertes. »
Il n’est
donc pas opportun d’être optimiste ou pessimiste (1) car nous n’en sommes qu’à
l’idée de négociations.
Mais
négocier quoi ? Il n’y a rien à négocier. La nature ne se négocie pas, on
la protège pour ce qu’elle nous donne.
QUELQUES POINTS POUR BIEN SE SITUER.
1-
Ne pouvant plus extraire le maerl depuis 2013,
la CAN invoque la nécessité comme prétexte à l’extraction de sable coquillier
dans la baie de Lannion, la nécessité absolue de l’amendement des sols bretons
pour justifier sa démarche. Elle
obtient, par décret du 15 septembre 2015 signé par Messieurs VALLS et MACRON,
la possibilité de le faire avec une autorisation annuelle préfectorale.
2-
Le potentiel d’extraction actuel de la CAN est
le suivant (Côtes d’Armor et Finistère) :
- La Cormorandière pour 20 000 m³/an jusqu’en (CAN + COPERMER),
- Les Duons pour 50 000 m³/an,
- La Horaine pour 125 000 m³/an.
Soit un potentiel
annuel de 195 000 m³/an.
La SAU (Surface
Agricole Utile) de la Bretagne est de 1 635 990 ha.
Le pH moyen est
de 6,3.
L’amendement à l’hectare est compris entre 100 et 300 kg/ha et par an
(soit entre 0.083 et 0.250 m³/ha
par an).
Le besoin annuel en sable coquillier est donc compris entre 45263 m³ et 136 335 m³. (2).
Ce besoin est donc largement couvert par le
potentiel des trois sites actuels et ceci jusque 2035/2036.
3- Le
besoin en amendement des sols bretons est réel, cependant les quantités nécessaires
à ce besoin ne justifient pas l’extraction de sable coquillier sur un quatrième
point et qui plus est, en Baie de Lannion et dont l’écosystème est équilibré.
4-
13
communes et 4 manifestations regroupant des milliers de gens (du Trégor et
d’ailleurs) sur terre et sur mer ont stoppé temporairement l’extraction de ce
sable particulier.
5-
Il n’est
pas évoqué directement la partie de l’exportation à l’étranger de cette matière
première, seuls les organismes officiels pouvant mener légalement ce type d’enquête.
Le sablier « Côte de Bretagne » (propriété de la CAN) a pompé aux
environs de 182 000 m³ de
sable coquillier en 2017 et 69 000 m³ au 15 juin 2018.
ET MAINTENANT ?
Nous serions
au point de départ d’une négociation entre le groupe Roullier et le gouvernement.
Est-ce cela le dialogue ? Où sont les associations dans cette
nouvelle démarche ?
Le danger est loin
d’être écarté, il nous faut rester vigilent (comme depuis 2015) et être prêt à
démontrer, encore et encore qu’il n’y a rien à négocier !
Philippe
Blondé pour le CA de Pleumeur Bodou Nature
(1) un
pessimiste est un optimiste qui a de l’expérience.
(2) Source :
Chambre de l’Agriculture Bretonne.